Comme en ont déjà témoigné Mélanie et Claire et comme j’en ai parlé dans mon article au sujet des 9 piliers d’une cuisine zéro déchet, il existe autant de bonnes raisons de vouloir réduire ses déchets que de moyens d’y arriver. Dans tous les cas c’est un cheminement avec plein de changements positifs à la clé, autant pour soi que pour la planète.
Aujourd’hui c’est au tour de Clémentine qui vit à Grenoble avec son Amoureux et leur Petit Lutin de 4 ans de nous raconter pourquoi et comment elle et sa famille ont réussi à réduire leurs déchets en cuisine. Cela fait près de 5-6 ans qu’ils y travaillent et aujourd’hui ils remplissent une poubelle de 30 litres grand maximum par semaine, ce qui devrait continuer de réduire puisqu’ils ont récemment commencé à composter leurs déchets biodégradables.
Clémentine, qu’est-ce qui t’a motivé à réduire tes déchets dans la cuisine?
Viser le zéro déchet n’est pas notre but ultime. Notre but ultime est de vivre de façon simple, écologique, sereine. Minimalisme et zéro déchet sont pour moi des outils pour y parvenir. Moins d’objets, moins de déchets, plus de temps pour nous : c’est là que se tient le coeur de notre expérience de cuisine zéro déchet.
Je préfère par exemple passer 20 minutes à préparer un gâteau avec Petit Lutin que de les passer réparties entre le temps d’acheter des paquets de biscuits tout prêts, trier les emballages, descendre les différentes poubelles. L’expérience en cuisine est plus sereine, épanouissante, écologique que celle du caddie ou de la poubelle. Le zéro déchet est un des outils que nous utilisons pour nous permettre d’appréhender la vie de la façon dont nous le souhaitons.
Depuis que j’ai découvert leur existence, j’étais très curieuse sur le fonctionnement des lombricomposteurs : pouvoir observer les vers en action, véritables architectes de la terre, c’est fascinant ! Je trouve l’idée géniale, surtout que nous adorons jardiner sur le balcon. Nous avons depuis peu le bonheur de posséder un joli lombricomposteur. C’est vraiment la curiosité qui m’a poussé vers son utilisation, en plus du fait qu’il nous permettait de descendre moins souvent les poubelles !
En quoi cela a-t-il changé ta manière de faire les courses et/ou de t’alimenter ?
C’est plutôt l’inverse en fait qui s’est produit : notre manière de faire les courses et de nous alimenter a diminué nos déchets. Nous sommes partis de loin : lorsque nous avons emménagé ensemble, avec notre budget d’étudiant, mon Amoureux et moi mangions des croque-monsieur ou des pâtes tous les soirs. Imagine les montagnes de jambon sous vide et autres sachets de gruyère ! Je n’étais pas très à l’aise avec l’idée de manger du porc, en plus élevé en batterie, si souvent, ni de ne jamais manger de légumes, mais je ne voyais pas bien comment faire autrement, avec notre budget et j’avais bien d’autres préoccupations en tête – bon sang, mais pourquoi ma courbe pratique ne suit pas la courbe théorique ? Ce genre de choses… !
Puis, avec nos bourses de thèses à mon Amoureux et moi les budgets ont augmenté et nous avons commencé à nous approvisionner au marché de producteurs. Un grand pas déjà, puisque nous n’avions plus d’emballages pour les légumes ni les fruits. Les produits transformés étaient pour la plupart dans des contenants consignés ou au moins récupérés : bouteilles de jus de fruit, de lait, confiture, compote, yaourts… Petit à petit, j’ai aussi apporté des récipients pour mettre le poisson, la viande, le pain… lorsque j’y pensais.
Ensuite, nous avons commencé à faire nos courses dans un magasin bio avec du vrac. Je me suis vite tournée vers lui pour des raisons économiques, et aussi pour le plaisir de me coudre mes sacs à vrac. Et quel bonheur d’aligner de jolis bocaux dans la cuisine !
Puis, nous nous sommes inscrits dans une AMAP, et là encore, les déchets ont diminués. Tout y est distribué en vrac, tous les contenants sont réutilisés – sauf ceux en plastique des fromages blanc.
Enfin, avec la végétalisation de notre alimentation, exit le papier de la viande quand nous oublions nos bocaux, le papier pour le fromage… Même si mon Amoureux et Petit Lutin ne sont pas végétaliens, la consommation globale de produits animaux de notre foyer a drastiquement diminuée, et avec elle, les emballages liés.
Évites-tu également les emballages recyclables ?
Oui, au maximum. Nous évitons les produits transformés au maximum. Mon Amoureux et Petit Lutin ont souhaité continuer à acheter quelques paquets de biscuits, sélectionnés avec soin (sucres et farines complets) pour les jours où nous n’avons pas d’encas maison rapide à se mettre sous la dent ou faciles à transporter.
Nous achetons aussi de la crème végétale, du lait végétal, des conserves de tomates, du tofu, de la sauce soja… À terme, j’espère pouvoir nous passer de certains de ces achats, mais cela demande de gros investissements de départ, au niveau financier ou au niveau de l’organisation, et nous les réalisons petit à petit.
Quelles ont été et/ou quelles sont encore tes plus grosses difficultés pour avoir une cuisine zéro déchet ?
Je ne peux aussi pas faire assez de bocaux à mon goût : tomates, haricots, petits pois… et nous les achetons en bocaux ou conserves. Nous ne possédons pas de blender assez puissant pour réaliser des purées d’oléagineux, et c’est très frustrant. Enfin, notre alimentation n’est pas assez prévisible pour que je puisse réaliser les laits végétaux, les crèmes car ils finissent trop souvent à la poubelle. Je pense que notre cuisine n’est pas encore optimisée au niveau des appareils qui s’y trouvent. Je souhaite aussi que nous nous séparions de notre congélateur, car l’usage que nous en faisons n’est pas satisfaisant.
Et j’ai surtout des progrès à faire au niveau de ma gestion du temps pour réussir à faire toujours plus de produits maison. J’ai l’impression que la gestion quotidienne du programme des repas me demande une grande énergie, que suivant les aléas de la vie, je peux ou non fournir.
Notre but ultime est de tendre vers la sobriété en cuisine, que ce soit au niveau déchets, comme au niveau des appareils. C’est pour cela que nous y allons tout doucement : pour évaluer réellement nos besoins avant d’acheter des appareils qui nous paraissent indispensables mais ne le sont en fait pas du tout.
Y’a-t-il d’autres habitudes que tu aimerais changer dans ton quotidien pour réduire ton empreinte écologique ?
Lorsque j’ai le moral dans les chaussettes, j’ai toujours envie de me faire livrer à manger de la comfort food. Pour moi, ça se résume à commander des hamburger (heureusement, il y en a des végétaliens !) à faire livrer. J’ai énormément de mal à me défaire de cette habitude qui est une sorte de baume contre le moral bas. Mon Amoureux a pourtant essayé de me faire lui même des hamburger maison dans ces cas là – objectivement, bien meilleurs ! – mais l’effet n’est pas le même, sans que je puisse expliquer pourquoi.
Sinon, nous aimerions faire d’autres gros changements, mais cela impliquerait d’acheter notre logement au lieu de le louer. Par exemple, j’aimerais avoir un lave-vaisselle à double entrée d’eau : chaude et froide, car cela consomme moins d’électricité. Ou encore pouvoir réaliser de nombreux bocaux, mais il faut pouvoir les stocker.
J’aimerais aussi posséder plus de tupperwares en verre et en métal, pour toujours avoir la possibilité d’emmener un encas facilement lorsque nous partons à l’aventure. C’est encore trop souvent à mon goût que nous emballons les parts de gâteau maison dans du papier alimentaire, certes écologique et recyclable, mais jetable.
Enfin, quelles sont les bonnes adresses que tu recommandes pour faire ses courses zéro déchet dans la région grenobloise ?
En premier lieu, une AMAP ! Local, éthique, pour moi c’est le must. Notre inscription a aidé un informaticien a se reconvertir dans le maraîchage, c’est tellement satisfaisant. La nôtre est l’AMAP aux potes, et propose de nombreux produits.
Il y a aussi le marché de producteurs locaux du samedi matin, à Hoche. Il y a énormément de produits différents : légumes et fruits bien entendu, mais aussi fromages : vache, chèvre et brebis, viande : porc, volaille et boeuf, oeufs, lait frais, champignons, pain, farines, légumineuses : lentilles, pois chiche…, céréales… Bref, de quoi faire ses courses avec très peu de déchets ! Satoriz, le magasin bio dans lequel nous allons propose pas mal de produits en vrac. Si tu prends des sacs à vrac réutilisables, c’est zéro déchet !
Enfin, il y a le magasin Mon Petit Okö qui propose plein d’alternatives saines pour emballer la nourriture des petits et des grands : tup en verre ou en inox, biberons en inox… et d’autres merveilles zéro déchet comme les couches lavables. Et Frank et Alexandra sont super sympas !
Crédit photos : Clémentine la Mandarine
Retrouvez Clémentine sur son blog, sa boutique en ligne, Hellocoton, sa page et son groupe Facebook.
Je te lis avec plaisir comme d’habitude Clémentine, ta façon d’appréhender notre environnement est semblable à la mienne, et j’apprécie vos échanges à toutes les deux. Pour moi le must fut longtemps le panier des Jardins de Cocagne qui alliait à mes yeux la proximité, des fruits et légumes bio et permettait la réinsertion de personnes. Mais aujourd’hui mon rythme de vie est différent et un engagement chaque semaine est plus difficile à tenir et j’ai donc arrêté. Par contre, du coup je me rends sur le marché beaucoup plus souvent, et j’ai noué des contacts privilégiés avec certains maraîchers bio qui me font (re)découvrir des plantes, des saveurs, idem pour les producteurs de fromage… Comme toi, j’évite au maximum les produits transformés, j’ai encore des efforts à faire pour les déjeuners sur mon lieu de travail… Il m’arrive encore trop souvent d’aller m’acheter un sandwich ou une salade, des gâteaux car le temps me manque et que je n’ai pas anticipé…Bonne journée à vous
Merci Béa 😀
Ce n’est pas évident au quotidien de gérer toute l’alimentation des midis au travail. Mon Amoureux s’est résigné à manger les restes de légumes de la veille au soir mélangés dans des pâtes qu’il cuit sur place (mais encore faut-il pouvoir le faire !). Je comprends en tous cas que tu sois parfois contrainte à t’acheter à manger.
Le marché de producteur est un bel endroit pour nouer des liens avec les producteurs, nous le constatons chaque semaine. Petit Lutin aime aller voir son copain le boulanger, discuter de la taille des fraises, choisir le paquet de farine ou le bouquet de fleurs…
En lisant ce témoignage, je suis nostalgique de l’AMAP de la Maison bleue (située au pied de la Chartreuse à Montbonnot si elle existe encore); que j’ai eu le plaisir de fréquenter puis de gérer pendant un an, une parenthèse enchantée. 🙂
C’est une façon d’envisager le zéro déchet qui me plaît beaucoup… Le faire, mais pas seulement pour réduire la poubelle, mais aussi pour retrouver les priorités, pour prendre le temps de faire ce qui nous fait du bien… Merci pour ce beau témoignage! Je sens que ce mois-ci (et le prochain!!) en sera rempli! 🙂
Ta cuisine fait envie! Bon ben j’ai plus qu’à réorganiser la mienne, vous m’avez motivé avec Mélanie!
Je suis comme toi pour la comfort food, il y a des fois ou se faire livrer est juste super agréable! Moi je sais que parfois, je suis frustrée de devoir tout cuisiner. J’adore cuisiner, mais si je suis pressée, cela me dérange parce que j’aime pas bâcler. Il faut que je travaille mes menus pour être plus efficace 🙂
Le souci est qu’ici je manque tellement d’ingrédients que je dois TOUT faire à la main. Pas de tahini? En route pour moudre des graines et les monter en purée. Pas de compote de pommes? Bon bein on coupe ces petites pommes et c’est parti! Autant dire que mon mixeur et mon gaz travaillent pas mal, du coup sur l’énergie c’est pas forcément le top.
Parfois une recette simple peut me prendre énormément de temps!
Bravo pour ta démarche, c’est super inspirant 🙂
Oh je connais ça aussi Emma. Nous travaillons avec des produits frais, et quand parfois nous rentrons « tard » (comprendre 18h30, avec un Petit Lutin affamé), le repas se termine en pâtes, et ça me fruste énormément quand c’est 3 soirs de suite ! Et ta situation à l’air encore plus complexe dis donc !
Coucou,
Si tu me lis Clémentine, je te conseille un simple torchon (en furoshiki; Malo commence à exceller avec les furoshikis pour ses pic-niques 😉 ) ou sac à vrac si tu veux éviter l’emballage jetable pour emmener des en-cas, ainsi que le lait d’avoine pour un lait végétal d’appoint (envie de crèpes, gaufres, etc…), pas besoin d’un long trempage et de filtrer l’okara.
Bises,
Marie.
C’est vrai que réduire les déchets de la cuisine se fait au fur et à mesure : cela fait quelques semaines que je m’y attache mais il faut le temps de terminer les derniers produits achetés sous emballage (des placards et ceux congelés) pour les remplacer par du vrac et les mettre dans des bocaux. Chez nous, c’est la cuisine qui produit le plus de déchet (surtout des emballages) alors que nous consommons déjà essentiellement au marché et en cueillette. Pour ma part, ce qui a vraiment fait la différence c’est le lombricompost. Merci pour cet article qui nous montre que changer ne se fait pas du jour au lendemain mais plutôt sur une démarche de long terme. Ca me déculpabilise de prendre autant de temps pour réduire mes déchets !