Après vous avoir présenté Nourrir son enfant autrement, le dernier ouvrage de Sandrine Costantino, j’ai eu envie de lui poser quelques questions pour en savoir plus sur son expérience en tant que maman végane de deux enfants âgés de 2 ans et demi et 7 ans. J’espère que ce partage répondra à certaines de vos propres interrogations et si les réponses de Sandrine vous donnent envie de creuser certains sujets, je vous conseille vivement de consulter son blog Végébon. Vous y trouverez de nombreux articles instructifs et détaillés aussi bien autour de l’alimentation que de la puériculture et des activités écolo/lectures engagées à proposer aux jeunes enfants. Mais pour l’heure, je vous laisse découvrir l’interview à laquelle Sandrine a eu la gentillesse de répondre !
Qu’est-ce qui t’a motivée à rédiger l’ouvrage Nourrir son enfant autrement et qu’as-tu souhaité transmettre à travers celui-ci ?
J’avais lu tous les ouvrages dédiés à une alimentation bio ou végé pour les enfants, ainsi que la plupart de ceux destinés aux enfants qui ne mangent pas assez, ou pas assez varié. Chacun apportait des informations intéressantes, mais devoir piocher dans des dizaines de livres n’est clairement pas pratique au quotidien. Et quand les Éditions La Plage m’ont proposé ce sujet de livre, j’ai eu un déclic : j’avais effectivement la légitimité pour rassembler tous ces conseils, ainsi que mes années d’expérience de maman et ma lecture des publications scientifiques, pour proposer un ouvrage complet sur l’alimentation familiale. Dans ce livre, j’ai souhaité répondre de manière concrète aux questions classiques qu’on se pose pendant la grossesse ou la vie avec de jeunes enfants, si on ne souhaite pas suivre les recommandations officielles françaises qui sont actuellement de consommer chaque jour 3 produits laitiers et 1 à 2 portions de viande, poisson ou œuf.
Comment ton entourage vit-il les choix alimentaires que ton mari et toi avez fait pour vos enfants ?
Nous avons eu notre premier enfant plusieurs années avant nos ami-e-s et cousin-e-s. Sans doute en partie grâce à cela, ils ont été totalement neutres sur nos choix alimentaires, qu’ils connaissaient depuis bien avant ma première grossesse. Nos parents ont été plus inquiets, voire extrêmement inquiets pour certains. Le fait de voir nos enfants naître et grandir en bonne santé les rassure progressivement. Entre temps, heureusement que mon mari et moi sommes alignés sur notre souhait de proposer une alimentation végétale à nos enfants, sinon il nous aurait été plus difficile de gérer la pression familiale.
Comment cela se passe-t-il pour tes enfants en dehors du cercle familial : à l’école, chez la nounou, chez les copains et les copines, etc. ?
Nous faisons de notre mieux pour adapter l’environnement, et ultimement nous laissons les enfants faire leurs propres expériences. Nos enfants mangent ce qu’ils souhaitent dans le menu proposé par l’adulte qui en a la garde. Chez nous, c’est naturellement végétalien. La nounou adapte ses habitudes pour cuisiner avec de la crème végétale, lui proposer des desserts au soja quand les autres enfants en ont au lait de vache, et elle ne lui sert des produits d’origine animale que s’il en émet clairement le désir, ce qui est extrêmement rare. À l’école, on s’est assurés qu’à la cantine les enfants n’étaient pas forcés de goûter à tout, comme chez les copains et copines. On applique les mêmes principes pour le respect des animaux que pour celui des femmes, des minorités visibles ou de la planète : notre monde ne partage pas souvent ces valeurs, ce qui ne nous empêche pas de les incarner au quotidien et de discuter du pourquoi et du comment quand on vit des situations qui ne les respectent pas.
Quelles sont tes petites astuces pour faire en sorte que les encas et les repas végétaliens de tes enfants répondent à tous leurs besoins nutritionnels ?
Pour le fer et le zinc, je propose à chaque repas des légumineuses et/ou des oléagineux et une source de vitamine C. Pour les oléagineux, je les propose à croquer pendant qu’on prépare le repas, ou je les utilise sous forme de purée dans les recettes de cuisine. Pour les légumineuses, je les intègre en cuisine assez classiquement, par exemple mixées avec les légumes de la soupe, ou sous forme de yaourt ou lait de soja. Pour les oméga 3, j’utilise beaucoup l’huile de colza en cuisine, en veillant à acheter celle qui supporte la cuisson. Pour le calcium, j’ajoute du carbonate de calcium en poudre dans les biscuits du goûter et/ou le plat du dîner. Pour la vitamine B12 et l’iode, j’utilise le comprimé Veg1 – les enfants adorent le croquer au petit déjeuner.
Quels sont leurs encas et leurs plats végétaliens préférés à l’heure actuelle ?
Notre encas favori, ce sont les pistaches, peu ou pas salées. Les enfants les adorent, et mon plus petit les mâche sans problème. Quand on doit partir et qu’on risque d’avoir du mal à trouver à manger équilibré, j’en emporte un bocal, avec un petit sac pour les coquilles. L’autre encas adoré par tous, ce sont les gressins italiens, mais j’en propose moins souvent car le blé est déjà largement présent dans notre alimentation. Le plat végétalien préféré de mes enfants est d‘ailleurs une assiette de pâtes avec la sauce tomate que prépare leur papa. En deuxième position dans leur cœur, il y a mes nuggets de pois chiche, de préférence avec du ketchup. Ils mangent également avec appétit le riz cuit aux lentilles corail (je démarre en premier la cuisson des lentilles corail, pour qu’elles se fondent dans le riz), par exemple sous forme de risotto aux cèpes séchés. Ils aiment également les carottes crues, en bâtonnet ou râpées (mais sans vinaigrette), le tofu fumé simplement coupé en allumettes…
Quels conseils donnerais-tu aux (futur·es) parents végé qui souhaiteraient offrir une alimentation 100 % végétale à leurs enfants mais qui redoutent de faire des erreurs et/ou d’être critiqué·es par leur entourage, le milieu médical, etc. ?
Je leur dirais de se renseigner auprès de sources fiables, comme celles citées dans mon livre ou le groupe Facebook Vive la B12 ! (dont tous les articles, comme celui sur les bébés véganes). En effet, il est tout à fait possible de proposer une alimentation 100 % végétale compatible avec une bonne croissance de l’enfant, mais pour cela il faut évidemment éviter certaines erreurs et il y a malheureusement encore beaucoup de désinformation sur ces sujets. Pour le calcium, par exemple, une alimentation végétalienne équilibrée ne suffit pas à combler les besoins. Il faut ajouter une source de calcium, soit sous forme de lait végétal enrichi, soit sous forme d’eau minérale naturellement riche en calcium, soit sous forme de carbonate de calcium. De même, pour l’iode il est important de veiller aux apports. Tandis que pour les protéines, il n’y a pas de problème si on applique l’équilibre alimentaire et qu’on mange à notre faim.
Enfin, en tant que maman végane depuis près de 7 ans maintenant, peux-tu nous dire ce que ce choix de vie t’a apporté ainsi qu’à ton couple et à vos enfants ?
Le choix d’appliquer des valeurs véganes dans un monde non végane nous apporte de la tolérance. On observe que tout le monde ne fait pas les mêmes choix, chacun a son chemin de vie. Ce mode de vie nous permet aussi d’apprendre à nos enfants à gérer la complexité du monde, de manière très simple. Quand ils ont une demande de consommation non végane, on en discute, on explique les enjeux d’un côté et de l’autre, parfois ils ont le dernier mot, parfois ce sont les parents. Je trouve que c’est une belle occasion de leur donner des outils pour avancer dans leur vie. Et bien sûr, à titre personnel, c’est une grande satisfaction pour moi d’avoir la chance de pouvoir vivre en appliquant les valeurs qui me sont chères.