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Végétalisme : l’expérience et les conseils d’Ophélie Véron

Lorsque j’ai découvert le blog d’Ophélie en 2013, j’étais encore loin de me douter combien les découvertes que j’y ferai m’inspireraient et m’aideraient dans mon cheminement vers un mode de vie plus sain, plus éthique et plus écologique… Envoutée par sa jolie plume, j’ai repris chacun de ses articles depuis le début et plus j’en lisais, plus je me retrouvais dans ses propos et plus ils confirmaient mon désir de cheminer vers le véganisme. Alors qu’auparavant ce mode de vie me semblait être hors de portée, j’ai réalisé grâce à toutes ses réflexions, ses astuces et ses recettes que je pourrais moi aussi peut-être y arriver un jour… Il faut dire que l’enthousiasme et la ferveur avec lesquels Ophélie partage ses idées et ses créations font non seulement réfléchir mais ils poussent aussi à (ré)agir ! En dehors de son blog, Ophélie s’investit également pleinement dans la sensibilisation du grand public à l’impact écologique de l’exploitation des animaux en tant que chargée de Mission Climat au sein de l’Association Végétarienne de France (AVF).

Arrêter ou réduire sa consommation de viande et de produits d’animaux est à mes yeux l’un des gestes les plus éco-éthiques que l’on puisse adopter dans son quotidien. Il me tient donc à coeur de soutenir toutes les initiatives qui vont dans ce sens et en particulier ce mois-ci où je consacre justement un éco-défi au végétalisme. C’est d’ailleurs dans ce cadre-là que j’ai contacté Ophélie, afin qu’elle partage avec nous son expérience et ses conseils…

Ophélie, te souviens-tu du jour où tu as décidé de devenir végétalienne et que tu l’as annoncé ? Qu’as-tu ressenti, comment ton entourage a-t-il réagi ?

Oui, je m’en souviens très bien car ça a été assez… catastrophique ! En bref, pour moi, ça a été un vrai coming out, même si cela s’est fait en plusieurs fois et que tous ces moments n’ont pas été aussi dramatiques les uns que les autres.

Le jour où j’ai dit à mes parents que je ne mangeais plus de viande, mon cœur battait comme un fou, j’avais les mains moites et les jambes un peu flageolantes. Mais c’est passé ! Mon père a juste répondu : ‘Mais tu manges encore du poisson ?’ et j’ai fait ‘Euh… bah… oui, oui, je mange du poisson !’ alors qu’en vrai, je n’en mangeais déjà plus vraiment. Pendant des mois, à chaque fois que j’allais les voir, j’avais droit à un énorme filet de poisson, ou bien des crevettes, des coquilles saint-Jacques, des écrevisses… la totale ! Mais le pire était encore à venir, quand je leur ai annoncé que je devenais végane.

En fait, c’est eux qui l’ont soupçonné, sans que je leur dise. Je me souviens en particulier d’un Noël assez horrible, où mon entrée dans chaque pièce était précédée de chuchotements et mes repas de regards en coin. Mon frère m’a traitée de squelette en m’apercevant, au sortir du train (alors que je n’avais pas perdu un gramme !) et il m’a questionnée, froidement : ‘Tu bois encore du lait ? et du fromage, tu en manges ?’. À chaque réponse patiente que je lui faisais, je le sentais qui s’agaçait de plus en plus, jusqu’à ce qu’il me dise sèchement pour couper court à la conversation : ‘Et bien, c’est très bête !’ et puis, plus tard : ‘Il faut te supplémenter sans attendre !’. D’après ce que j’ai compris un peu plus tard, mes parents faisaient courir la rumeur que j’étais devenue anorexique, alias végane. D’où la réaction de mon frère… Je suis ressortie de ce Noël en pleurs, détruite, avec une envie de fuir à l’autre bout du monde et de ne plus jamais parler de mon végétalisme.

Et pourtant, quelques semaines après, renforcée par le soutien de mon chéri, j’ai annoncé fièrement à mes amis que j’étais végane. Et là, soulagement, ils l’ont tous bien pris ! J’ai eu le droit à plein de questions, des demandes de recettes, de la curiosité bienveillante et même des sourires ! J’en suis ressortie fortifiée et prête à affronter ma famille qui, au bout de plusieurs mois / années, a fini par accepter mes choix et, maintenant, on peut dire que tout va bien ! Ma maman m’a d’ailleurs récemment avoué en discutant de cette période : ‘Ce n’est pas non plus comme si tu partais en Syrie pour entrer dans l’État Islamique, mais bon, ça nous a bien chamboulés !’.

Comment s’est déroulée ta transition vers une alimentation végétalienne, as-tu rencontré certaines difficultés, comment les as-tu surmontées ?

À vrai dire, ma transition s’est très bien déroulée. Je dirais que ce qui a été le plus dur, ça n’a pas été de trouver comment remplacer des produits animaux, de faire des gâteaux sans œufs, de surmonter des carences que je n’ai jamais eues ou d’apprendre à me débrouiller à l’extérieur en échappant au jambon-beurre… Non, le plus dur, ça a été ma famille (vous ne vous en doutiez pas, n’est-ce pas ?).

Il a fallu du temps vraiment pour que mes parents commencent à prévoir des plats pour nous (mon chéri et moi) et que nous n’ayons pas soit à nous contenter des accompagnements, soit à nous faire à manger en plus. Le pire dans tout cela ? À chaque fois que nous nous préparions des petits plats végé, tout le monde voulait y goûter et nous n’en avions presque plus pour nous ! En même temps, c’était plutôt bon signe ! 😉

Pour finir sur une note plus gaie, il faut savoir que mes parents nous reçoivent maintenant comme des rois et que c’est un véritable plaisir d’aller dîner chez eux ! Je repars toujours de chez eux les sacs bourrés de noix, fruits secs, plaquettes de chocolat et bon pain au levain !..

Typiquement, les personnes qui ne connaissent pas grand chose à l’alimentation végétalienne s’inquiètent de nos apports en protéines, en fer et en calcium notamment : comment les rassurer ?

Je leur conseille de se procurer le Guide du Végétarien Débutant, rédigé par l’Association Végétarienne de France et à télécharger gratuitement sur leur site. On y trouve également des fiches nutrition sur les nutriments clefs, comme le fer ou les protéines, ou sur les enfants végétariens. Le tout expliqué avec une grande clarté montre que manger végé, c’est non seulement faisable et gourmand, mais également bon pour la santé !

Le seul nutriment qu’une alimentation végétalienne ne puisse apporter, c’est la vitamine B12. Comment se fait-il qu’un régime carné en contienne et quelles sont les différentes options pour ne pas en manquer lorsqu’on ne consomme ni viande ni produits d’animaux ?

La B12 sert en général à critiquer le végétalisme : ‘Être végane n’est pas naturel, car il faut se supplémenter en B12 !’ Et c’est vrai, on ne trouve pas de sources de B12 dans les végétaux. En fait, aucun animal ne peut synthétiser directement cette vitamine : nous dépendons tous de bactéries, transmises des herbivores aux carnivores, qui la produisent. Chez les ruminants, à l’exemple de la vache, ces bactéries se développent dans leurs estomacs durant la lente digestion de l’herbe et des végétaux. La vitamine B12 d’origine bactérienne est absorbée au moment où ces aliments traversent les intestins. Chez d’autres animaux, comme le lapin, cette production n’a lieu qu’à la fin des intestins, ce qui ne leur permet pas de l’assimiler : ils doivent alors l’obtenir autrement… en mangeant leurs crottes !

Donc, en gros, si nous voulons absorber de la B12 sans passer par des suppléments, nous avons le choix : manger nos excréments ou manger des herbivores. Le problème, c’est que ces herbivores dont nous consommons la chair (vaches, moutons, lapins, etc.) ou les produits (lait, fromage, oeufs…) sont eux-mêmes supplémentés en B12. Parce que nos sols sont devenus trop ‘propres’ et que les tourteaux de soja sont plus ‘rentables’ pour les producteurs que l’herbe et la verdure, les animaux ne peuvent plus produire suffisamment de B12. Pour combler leurs carences, on leur donne des suppléments.

Donc, en fait, tout le monde se supplémente en B12, que cela se fasse directement ou indirectement. Les non-végés le font indirectement, en consommant des animaux (ou des produits issus d’animaux) ayant été supplémentés, et les végés le font directement, en avalant une micro-gélule trois fois par mois (peut-être que d’autres font comme les lapins, mais je ne veux pas savoir !..). Quand on sait que la B12 est une vitamine relativement fragile et qu’elle résiste notamment mal à la cuisson (faire bouillir du lait suffit à la détruire), on se dit qu’il vaut mieux se supplémenter directement, comme le font les végés, pour bien l’assimiler ! D’ailleurs, c’est une carence très répandue parmi les non-végés…

Plusieurs options existent pour se supplémenter : ampoules, comprimés, éléments fortifiés… Un tout petit geste seulement pour une santé optimale !

Quels conseils donnerais-tu à celles et ceux qui hésitent à adopter une alimentation végétale à cause du manque de compréhension et de soutien de leur entourage ?

Je dirais de ne pas trop s’en faire et de poursuivre malgré les obstacles premiers : par expérience, je peux quasi-certifier que l’entourage finira par s’y faire ! Alors oui, on sera peut-être regardé comme une bête étrange au départ, mais quelle satisfaction quand on sait tout ce qu’on fait pour la planète et ses êtres vivants ! (et quand on pense aux sacs remplis de noix et de chocolat de ma maman !)

Penses-tu que le végétalisme soit une alimentation souhaitable et possible pour tous les êtres humains ?

Ouiiiiiiii !!!

D’ailleurs, ce n’est pas moi qui le dit, mais (entre autres) l’Association Américaine de Diététique : « Les alimentations végétarienne et végétalienne bien planifiées sont appropriées à tous les stades de la vie, y compris la grossesse, l’allaitement, la petite enfance, l’enfance, l’adolescence, et pour les athlètes. Planifiées de façon adéquate, elles satisfont les besoins nutritionnels des bébés, des enfants et des adolescents, et contribuent à une croissance normale. »

Pour aller plus loin…

Que vous inspirent l’expérience et les conseils d’Ophélie ?
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