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Pourquoi je ne mange presque plus de produits laitiers

Pendant (trop) longtemps, j’ai pensé que les produits laitiers étaient fabriqués grâce au lait de vaches ayant paisiblement brouté l’herbe des champs leur vie durant et qu’elles avaient naturellement un stock de lait en continu… qui nous était destiné. Je pensais aussi que l’on récupérait leur peau pour en faire du cuir ainsi que leur chair pour en faire de la viande après, et seulement après, les avoir laisser profiter d’une vie tranquille et mourir de vieillesse… toujours au milieu d’un champs.

Dire que j’étais naïve serait un euphémisme…

Lorsque j’ai cherché à en savoir plus sur la manière dont la viande était produite, j’ai alors appris qu’il y avait deux types de vaches : les vaches allaitantes et les vaches laitières, toutes deux nées grâce à un processus de sélection artificielle leur permettant de répondre au mieux à la fonction qu’on attend d’elles- produire de bons steaks pour la première, et du bon lait pour la seconde.

Premier choc : qu’on en exploite la peau, la chair ou le lait, les vaches des élevages industriels- c’est à dire la majorité des vaches- ne mènent pas la vie décrite par les spots publicitaires ! Elles doivent leur existence à la manipulation génétique et leurs conditions et durée de vie sont prédéterminées en fonction du rôle qui leur aura été attribué avant même que leur embryon ne soit crée !

J’ai ensuite découvert que pour pouvoir produire du lait une vache doit être enceinte : ce lait qui sort de ses pis en quantité limitée est donc normalement réservé à sa progéniture durant les 8 à 10 premiers mois de sa vie. Hors, dans les élevages industriels, un veau n’en profite pas plus de 24 à 48h, délai au delà duquel il est littéralement arraché à sa mère. Ainsi, les machines peuvent traire cette dernière et stocker chaque goutte de lait qu’elle produira afin d’assouvir notre soif de produits laitiers.

Second choc : les produits laitiers que je consomme sont produits à partir de lait normalement destiné à nourrir les veaux ! Non seulement on prive les veaux de nutriments essentiels à leur bon développement mais en les isolant si tôt on les prive de la tendresse, de la chaleur et de l’amour de leur mère, essentiels à leur bien-être. Les cris des vaches à qui on vient de voler leur progéniture et qui meuglent parfois des jours durant prouvent combien cette isolation est traumatisante pour les veaux comme pour leur mère.

Pendant ce temps, le veau mâle est isolé et nourri à base de substituts pauvres en fer afin de répondre aux exigences des consommateurs qui préfèrent la viande de veau rosée et non rouge ! 8 à 12 mois plus tard il est abattu en transfomé en steaks. S’il s’agit d’une génisse et que ses caractéristiques physiques s’y prêtent, elle subira le même sort que sa mère et dans le cas contraire, elle suivra le destin des veaux mâles.

Troisième choc : les veaux sont, durant leur vie raccourcie, non seulement privés de l’attention de leur mère, mais en plus de nutriments essentiels pour le plaisir de… nos yeux !

Alors que son petit lèche instinctivement les barres en fer de sa box pour pallier à son anémie, on trait sa mère sans relâche pendant une dizaine de mois et ce même durant les 3/4 de sa grossesse suivante. En temps normal, elle produirait environ 4 litres de lait par jour. Grâce à la sélection artificielle, on arrive à tirer des vaches allaitantes de 30 à 60 litres par jour ! 3 mois après chaque velage, elles sont à nouveau inséminées artificiellement pour donner naissance à un autre veau 10 mois plus tard… et ainsi de suite. Dans des conditions de vie naturelles, une vache vivrait une vingtaine d’année ; les vaches laitières, elles, ne sont plus considérées comme bonnes à rien au bout de 5 à 7 ans. Elles subissent alors le même sort que leur congénères allaitantes et finissent dans notre assiette après un douloureux passage à l’abattoir.

Quatrième choc : les produits laitiers issus de l’élevage industriel sont le fruit d’abominables souffrances, depuis le premier et jusqu’au dernier jour de leur vie, et ils sont le résultat de croisements génétiques privilégiant le rendement plutôt que le bien-être de l’animal. Alors que les manipulations génétiques ont permis aux experts de multiplier la quantité de lait qu’une vache peut produire, elles n’ont pas permis de leur assurer une stature physique pouvant supporter une telle surproduction. Comme le décrit Thomas Lepeltier :

“Leur pis débordants de lait sont donc très lourds, et trop volumineux, ce qui provoque un écartement des membres postérieurs, des lésions au niveau des pieds, des boiteries et autres problèmes fonctionnels” (La révolution végétarienne, p.37).

Lorsque arrive l’heure de s’en « séparer » (pour ne pas dire débarrasser), elles peuvent difficilement marcher ni même tenir debout. Elles sont donc conduites dans les camions et les couloirs de l’abattoir grâce à des treuils et à des coups de bâtons…

© Jo-Anne McArthur, We Animals
© Jo-Anne McArthur, We Animals
© Jo-Anne McArthur, We Animals

Ce que mes découvertes ont changé

Depuis que j’ai découvert tout cela, je ne peux regarder un produit laitier sans penser à la misérable vie des vaches laitières et de leurs petits veaux anémiés… Et cela me peine autant que ça me dégoute. Bien sûr, je sais que tous les produits laitiers ne sont pas issus de l’élevage industriel, mais la grande majorité le sont, qu’ils soient bio ou pas. Et dans tous les cas, à partir du moment où l’on prend le lait d’une vache, soit on prive un veau de sa ration, soit on force la vache à produire plus de lait de manière artificielle.

En même temps que j’ai décidé de ne plus manger d’animaux, j’ai décidé de ne plus cuisiner de produits laitiers puisque j’ai appris que l’on pouvait très bien s’en passer… En effet, les nutriments des produits laitiers peuvent facilement se trouver dans une diversité de sources végétales qui seraient en plus bien meilleures pour notre santé

Jusque-là je mettais du lait dans mon thé, du beurre dans mes gâteaux, mes muffins et mes biscuits, de la crème dans mes quiches et mes gratins, et je mangeais du fromage pour caler mes petites fringales dans la journée ou à la fin d’un repas. Petit à petit, j’ai appris à apprécier mon thé sans lait, à faire des gâteaux à base d’huiles végétales ou de purées d’oléagineux, des quiches et des gratins à la crème végétale… N’ayant jamais aimé le goût et la texture du lait sous forme liquide, cela faisait déjà longtemps que je mettais déjà du lait végétal dans mes céréales du petit déjeuner.

Voilà donc plus d’un an que je cuisine sans produits laitiers et même s’il y a eu des ratés et des faux pas en cours de route et qu’il y en a encore parfois, ces derniers ne m’ont jamais manqué dans mes préparations. Bien au contraire, j’ai découvert de nouvelles saveurs, de nouvelles textures… et j’en découvre encore tous les jours ! 

Pourquoi je consomme encore des produits laitiers ?

Si ne plus manger de viande du tout et ne plus cuisiner de produits laitiers chez moi me semble simple, ne plus consommer de produits laitiers en société me semble plus compliqué. Trouver des alternatives qui soient à la fois sans viande, sans blé (je n’en mange plus depuis plus de 10 ans pour des raisons de santé) ET sans produits laitiers lorsque je suis à l’extérieur est généralement compliqué. En outre, demander un plat végétal à des personnes qui me reçoivent le temps d’un repas, qui se plient déjà en 4 pour éviter la viande et le blé dans leur menu et qui n’y connaissent rien aux alternatives sans produits laitiers me met encore très mal à l’aise…

De plus, manger bio, des fruits et légumes locaux et de saison, des produits importés issus du commerce équitable, éviter les aliments en conserve et les additifs alimentaires etc. sont pour moi autant de facteurs importants dans le cadre d’une alimentation saine, éthique et écologique… Pourtant, il ne me viendrait jamais à l’esprit d’imposer à mes hôtes de prendre en compte ces critères-là aussi dans l’élaboration de leur menu ! De la même manière, je ne refuserais pas de manger ma part de dessert sous prétexte qu’il contient du chocolat non-équitable ou je ne mettrais pas de côté les tomates qu’on me sert en entrée en plein mois de décembre…

Prendre soin de la terre et des humains qui nous nourrissent est pour moi aussi important que de prendre soin des animaux avec qui nous partageons cette planète. Alors pourquoi imposerais-je à mes hôtes de bannir les produits laitiers de mon assiette mais pas le chocolat issu d’une plantation où l’on exploite les enfants ? Le bien-être des uns est-il plus important que le bien-être des autres ? Par contre, quand je prépare mes menus et que je fais mes courses, j’ai la liberté de choisir consciencieusement à qui je donne mon argent. Donc en attendant de pouvoir complètement bannir certains aliments quand je mange à l’extérieur, chez moi, je fais de mon mieux pour ne plus financer directement les industries dont les valeurs ne rejoignent pas les miennes, et ce dans tous les domaines alimentaires.

Enfin, si Mister Vert se passe volontiers de viande à la maison, les produits laitiers sont encore présents dans quelques unes de ses recettes. Étant donné que c’est moi qui gère la grande majorité des repas (par plaisir et par habitude), je suis vraiment ravie quand il s’organise pour nous cuisiner un repas de temps en temps ! Dans ces cas-là je n’ai ni l’envie de cuisiner un plat à part, ni à coeur de lui imposer une liste d’ingrédients- auxquels il ne connait pas (encore) les alternatives- à éviter. Cela dit, à part du fromage de temps en temps, ses préparations culinaires se sont naturellement végétalisées au fil du temps (sans que je ne le lui demande ni le lui impose), pour notre plus grand bonheur à tous les deux !

Cependant, à chaque fois que je consomme un plat qui contient des produits laitiers, je pense à la misérable existence des vaches et à leurs petits veaux que ce lait aurait dû nourrir… De la même manière que quand je croque dans un carré de chocolat d’une marque lambda, je me demande combien d’enfants ont été exploités pour qu’il arrive jusqu’à moi… Et quand je mange une soupe de tomates en plein hiver, je me dis « Quel gâchis ! »…

Et chacun de ces faux pas me pèse autant… et de plus en plus.

Choisir une alimentation 100% végétale me semble être une évidence car cela allègerait un peu plus ma conscience les rares fois où j’avale encore des produits laitiers. Ce serait un pas de plus vers une alimentation plus éthique… même si elle ne serait pas encore 100% éthique à mes yeux.

Je sais que certains me jetteront la pierre et me critiqueront de ne pas passer au végétalisme pur et dur malgré mes prises de consciences et mes valeurs. Inutile de me faire culpabiliser. Je n’ai jamais prétendu être un modèle en terme de mode de vie éthique et écologique… D’ailleurs si vous en connaissez un, n’hésitez pas à me le présenter 😉 . Mais je fais de mon mieux et à mon rythme… 

Je pense aussi que beaucoup de blogueurs/blogueuses attendent d’être officiellement végétalien-ne-s pour en parler sur la blogsphère (ceci n’est pas une critique) mais trop peu parlent publiquement de cette difficile période de transition- entre prise de conscience, prise de décision et passage à l’action… Car c’est tellement plus facile d’être applaudi pour ce que l’on a accompli que de trouver un soutien bienveillant pour y arriver… alors parlons-en !

© Jo-Anne McArthur, We Animals

Sources :

Livres présentés dans cet article.

Pour aller plus loin :

Consommez-vous des produits laitiers ? Seriez-vous prêt-e-s à les bannir complètement de votre alimentation ?
Quel que soit votre avis, je vous remercie de l’exprimer avec bienveillance 🙂
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