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Végétalisme et santé : l’avis de Pauline, future médecin végé

J’ai découvert Pauline grâce au superbe témoignage publié chez Antigone XXIFuture médecin, pourquoi je suis devenue végétalienne. Cette jeune étudiante en 6ème année de médecine y partage son cheminement vers le végétalisme, ses remises en questions, ses frustrations et ses aspirations- un parcours très inspirant…

Depuis peu, Pauline tient également un joli blog, Ambre et Noésis, où elle parle de ses expériences, de ses réflexions et livre ses conseils à « tous ceux qui rêvent de liberté ». Sa manière de voir le monde et surtout de concevoir la santé me parlent beaucoup. J’ai donc voulu avoir son avis d’étudiante en médecine sur quelques questions en lien avec l’alimentation végétalienne…

Qu ’est-ce que l’alimentation végétale t’a apporté ?

L’alimentation végétale m’a permis de m’intéresser à la cuisine. Alors qu’auparavant je détestais cuisiner et préférais me faire cuire des pâtes et y ajouter du ketchup, dorénavant je prends beaucoup de plaisir à penser mes plats, à faire mijoter et surtout, à déguster ! Cuisiner me détends autant que cela me stimule. Le végétal m’a aussi permis de découvrir un tas de saveurs nouvelles et délicieuses, des plus basiques aux plus originales. Je n’ai jamais mangé aussi varié que depuis que je suis végétarienne !

Et puis elle m’a permis de me sentir en grande cohérence avec moi même. J’ai dorénavant l’impression d’être bienveillante jusque dans mon assiette et j’en retire une certaine fierté. Lorsque j’ai pris la décision d’être végétalienne j’ai eu peur que cela m’éloigne des gens. Finalement, tous mes proches sont curieux, s’intéressent à la cuisine végétale en posant des questions ou en voulant y goûter. Je n’ai pas le sentiment de m’être isolée des autres, bien au contraire, d’autant plus que j’ai rencontré un tas de végétariens et que je me suis fait de nouveaux amis.

Tu as dit, très justement à mon sens : “Je fais mienne la devise d’Hippocrate : « Que la nourriture soit ton médicament »”. Quels sont d’après toi les bienfaits du végétalisme pour la santé ?

Le végétalisme fait la part belle aux fruits et légumes bien entendus, mais aussi aux céréales, légumineuses, oléagineux et huiles végétales qui sont des aliments plein de vitamines, nutriments et minéraux. L’alimentation végétale couvre largement tous les apports nécessaires contrairement à ce qu’on veut bien nous faire croire. La mythe du végétalien, maigre, rachitique et carencé a la dent dure mais je sens que les choses sont en train d’évoluer dans le bon sens. Le seul complément dont a besoin un végétalien est un complément en vitamine B12.

Une alimentation végétale exclut donc la viande qui contient beaucoup d’acide gras saturés, consommés en excès dans la population occidentale et ayant un rôle non négligeable dans la flambée des maladies cardio-vasculaires. De même elle exclut les oeufs que l’on conseille de limiter aux personnes ayant un taux de cholestérol trop élevé ainsi que le lait qui est à mon sens une aberration. Le lait est destiné au petit de la vache et non à nous êtres humains. Il contient des facteurs de croissance dont le rôle est de faire grossir un veau et non pas à d’être consommés par des êtres humains adultes comme enfants. Quant au calcium, pas de panique, on en trouve très bien ailleurs (sésame, amandes, fruits secs, etc).

De plus, les végétaliens sont généralement calés en nutrition. Ils mangent le plus souvent des aliments complets et biologiques, de bonnes huiles extraites à froid et consomment en somme des produits bien meilleurs pour la santé et non pas des « calories vides » (aliments raffinés, débarrassés de tous leurs nutriments et vitamines).

Globalement l’alimentation végétale est donc très bonne pour la santé et il est d’ailleurs démontré que les végétariens ont un risque de cancer de 10% inférieur au reste de la population (selon le Pr. Henri Joyeux).

Beaucoup de personnes qui s’intéressent au végétalisme ou qui en sont critiques s’inquiètent d’abord des carences en protéines – est-ce une appréhension justifiée ? Quelles sont les différences entre les protéines animales et végétales ?

C’est une croyance totalement injustifiée. D’abord je tiens à rappeler que nous n’avons pas besoin de beaucoup de protéines. Les nutritionnistes recommandent un apport protéique de 10 à 15% du total des apports. C’est peu, et ça ne nécessite sûrement pas de manger de la viande à chaque repas ni d’en faire l’aliment central de son assiette. De plus, plusieurs études montrent que l’apport minimum en protéines nécessaire serait en fait moins important (Dans l’Enquête Campbell, le professeur Campbell va même jusqu’à démontrer les effets néfastes des protéines animales sur la santé).

Et puis, des protéines, il y en a partout ! La palme revient au soja qui en contient beaucoup (90g de protéines pour 1000 Kcal) mais on en trouve aussi dans les céréales, les légumineuses et les oléagineux.

Les protéines végétales ont mauvaise réputation. On dit d’elles qu’elles ne contiennent pas d’acides aminés essentiels (qui doivent être apportés par l’alimentation) et qu’elles sont mal assimilées. Cependant, quand bien même elles seraient moins bien assimilées, on en trouve suffisamment partout pour que les apports recommandés en protéines soient largement comblés par une alimentation végétale. Quant aux acides aminés essentiels ils sont apportés par une alimentation variée équilibré qui garantit un apport protéique optimal. Dans la mesure ou une alimentation équilibrée et variée est indispensable lorsqu’on souhaite être en bonne santé, c’est un conseil qui devrait être appliqué par tout le monde et pas seulement par les végétariens !

Y a-t-il d’après toi plus de risques de carences dans un régime végétalien que dans un régime carnivore ? Quels sont selon toi les bases d’une alimentation végétale équilibrée ?

Théoriquement il y a plus de risques de carences. Risques de carences en protéines, en fer et en vitamines B12 par exemple. Dans les faits je pense que ça n’est pas le cas. En effet les végétariens et les végétaliens sont très au fait des carences potentielles et prennent bien garde à équilibrer leurs apports tandis que les omnivores pensent ne pas être concernés et ne se surveillent pas. Il est simplement important de rappeler aux végétariens qu’ils doivent se complémenter en vitamine B12, seule vitamine qui ne peut être apportée par une alimentation végétale équilibrée.

Petite anecdote à propos des carences : le chef d’un grand service parisien d’hématologie qui nous faisait un cours sur l’anémie (qui peut être causée par des carences en fer, vitamines B9 et B12) nous a dit que les végéta*iens n’étaient que très rarement carencés car ils étaient très calés en nutrition…

Lorsqu’il t’arrive parler de végéta*isme dans le cadre de tes études, tu disais que les réactions de tes supérieurs étaient “globalement toujours intolérantes et violentes”. Pourquoi ? Y a-t-il des chances pour que la vision du végétalisme par le corps médical évolue dans les années à venir d’après toi ?

Je vais encore m’attirer les foudres de mes (futurs)collègues mais je trouve le milieu de la médecine (tout du moins hospitalière, celle que je connais en tant qu’étudiante) très fermée à d’autres types de médecine. Il existe un certain corporatisme médical qui veut que les médecins ne restent qu’entre médecins et dénigrent les autres pratiques, les qualifiant vite de charlatanisme. Si le programme national de nutrition santé dit qu’il faut manger de la viande et des produits laitiers tous les jours, alors c’est ainsi et ce même si sa transparence sur le sujet peut être questionnée. Il existe des personnes suffisamment critiques du système pour remettre en question ce programme par exemple mais la grande majorité des médecins hospitaliers que j’ai rencontrés le suivait à la lettre.

De plus, la médecine occidentale est une médecine basée sur les preuves. On me demande sans arrêt des études en double aveugle ou des méta-analyse pour prouver ce que j’avance. Études qui ne sont pas forcément faites car, comme le faisait très justement remarquer David Servan Schreiber dans son livre « Anticancer » on ne peut pas breveter les framboises. Du coup, même si les framboises s’avèrent être des fruits aux multiples bénéfices évidents pour la santé elles n’intéressent aucun labo puisqu’il n’y a aucun moyen de gagner de l’argent en les étudiant.

Je pense que la vision du végétalisme peut évoluer dans les années à venir et que cette évolution nous arrivera des États-Unis. C’est comme cela que ça s’est passé pour toutes les récentes évolutions de la médecine : elles sont arrivées en France plusieurs dizaines d’années après avoir été découvertes de l’autre côté de l’Atlantique. Là-bas, le végétalisme est considéré comme un mode de vie sain quand chez nous il est encore vu comme une pratique presque sectaire. Rendez-vous dans quelques années !

Pour aller plus loin

Et votre médecin, qu’est-ce qu’il/elle en pense du végétalisme ?
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