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3 romans au cœur de la nature #2 – Appalaches, Orcades et val d’Aoste

Voilà déjà plus d’un an que j’ai publié le premier article de cette série consacrée aux romans dans lesquels la nature joue un rôle prédominant ! C’est le temps qu’il m’aura fallu pour en lire trois nouveaux ! Moi qui lisais facilement plusieurs romans par mois jusqu’à l’adolescence, mon besoin de m’informer sur les causes socioculturelles et environnementales me préoccupant m’a poussé à lire davantage d’essais, d’ethnographies et de guides pratiques par la suite. Cependant alarmé par l’état d’anxiété dans lequel me plongeait ces lectures, J. m’a vivement encouragée à me remettre à lire des romans de temps en temps. Bien que certaines histoires romanesques puissent me chambouler, elles ne m’abattent jamais autant que ces ouvrages ancrés dans la réalité et elles me procurent un sentiment d’évasion qui m’est toujours très salutaire. Prendre le temps de lire un roman me demande toutefois bien plus d’efforts que de me plonger dans un essai traitant d’une problématique qui m’intéresse… Cela reste néanmoins un effort que j’ai à cœur de poursuivre, en particulier en cette période où la maternité me laisse peu de répit. M’offrir ne serait-ce qu’une dizaine de minutes pour me changer les idées, me détendre et m’évader un peu avant d’aller dormir m’est désormais devenu nécessaire !

Je vous propose donc de découvrir les trois romans que j’ai lus ces derniers mois et qui m’ont permis de découvrir de jolies plumes ainsi que de nouveaux horizons : les Appalaches aux USA, les Orcades en Écosse et le val d’Aoste en Italie.


Dans la lumière de Barbara Kingslover (Titre original : Flight behavior)

Résumé : « Dans les Appalaches, au cœur de la forêt, Dellarobia Turnbow aperçoit une lumière aveuglante. La vallée semble en feu. Mais ces reflets rougeoyants n’ont rien à voir avec des flammes. Ce sont les ailes de centaines de milliers de papillons qui recouvrent le feuillage des arbres. Cette étrange apparition devient un enjeu collectif : la communauté religieuse de la ville y reconnaît un signe de Dieu, quand certains scientifiques invoquent une anomalie climatique. Toute l’Amérique se met à observer ce coin isolé, ancré dans les traditions rurales : Dellarobia comprend que de simples papillons vont bouleverser sa vie, et peut-être l’ordre du monde. »

Mon avis : suite à la publication du premier article de cette série, vous aviez été plusieurs à me recommander l’œuvre de Kingslover. J’avais donc ajouté quelques-uns de ses romans à la liste d’idées de cadeaux pour mon anniversaire l’an dernier et J. a finalement choisi de m’offrir Dans la lumière (« parce qu’il y avait des papillons sur la couverture », m’a-t-il dit !).

Ce roman nous plonge dans le quotidien et les tracas de Dellarobia, une jeune mère au foyer vivant dans la précarité, au sein de la ferme de ses beaux-parents avec qui elle n’a pas d’affinités particulières. Peu épanouie dans sa vie de couple, elle trouve tout de même un peu de réconfort dans ses échanges avec Dovey, son amie d’enfance. Puis, du jour au lendemain, alors que Dellarobia découvre que des milliers de papillons monarques ont envahi la forêt, sa vie teintée de lassitude et de morosité prend un tout nouveau tournant… Cet événement lui permet de sortir de sa routine et de mettre sa sensibilité, son intelligence et ses convictions au profit de la protection des papillons et de la forêt où ils ont élu domicile. Complexée par son manque d’éducation et la modestie de son mode de vie, elle a toutefois du mal à se sentir à sa place parmi les scientifiques en charge d’élucider les causes de la déviation de la route de migration des papillons. 

Moi qui pensais lire une histoire traitant principalement de problèmes environnementaux, j’ai finalement découvert un roman engagé sur plusieurs fronts. Ainsi, au-delà du dérèglement climatique évoqué pour expliquer la perturbation de la route migratoire des papillons, le féminisme, le manque d’éducation et la pauvreté constituent les thèmes de fond de ce roman. Pour ne rien gâcher, l’histoire est superbement écrite – les descriptions riches en images et en vocabulaire se mêlent à des dialogues plus familiers et plein d’authenticité qui m’ont donné le sentiment d’être vraiment ailleurs tout au long de ma lecture. Cette première lecture de Barbara Kingslover m’a donné envie de découvrir d’autres de ses romans – je les lirai toutefois en français pour en apprécier pleinement le style.


L’écart d’Amy Liptrot (Titre original : The outrun)

Résumé : « Dans l’oubli hypnotique des nuits londoniennes, une jeune femme noie sa solitude grâce à l’alcool. Mais au bout de dix ans de fêtes tristes, dix ans d’excès, dix ans perdus, elle est épuisée. Elle retourne alors sur son île natale, au sein de cet archipel des Orcades isolé au nord de l’Ecosse. Elle échange la bouteille assassine pour la Thermos de café, la contemplation de la faune interlope pour celle des étoiles et des nuages. Elle se découvre assoiffée de grand large, de grand air, de grande beauté. Et si le fragile râle des genêts, cet oiseau en voie d’extinction aussi farouche qu’elle, était plus fort qu’il n’y paraît ? »

Mon avis : ce roman n’aurait certainement pas retenu mon attention au gré de mes pérégrinations dans une librairie, mais lorsqu’on m’a proposé de me l’envoyer en service presse, je me suis dit que c’était l’occasion de découvrir une autrice, un sujet et un contexte qui ne m’étaient pas du tout familiers. Et je n’ai vraiment pas regretté !

L’écart est un roman autobiographique aussi enrichissant que dépaysant. D’un côté, le récit personnel d’Amy Liptrot m’a permis de découvrir les dessous de l’alcoolisme et d’en comprendre certains mécanismes. En revenant sur certains évènements et souvenirs de ses années d’ivresse, l’autrice illustre comment l’alcool a pu teinter sa vie à la fois de souffrance et d’euphorie, de détresse et d’espoir, d’abandon et de détermination, de solitude et de rencontres multiples… Sans s’apitoyer sur son sort, elle raconte de manière très factuelle et raisonnée comment l’alcool a détruit sa vie personnelle, amoureuse et professionnelle. En parallèle, Liptrot nous raconte son histoire familiale, son enfance dans les Orcades et son cheminement vers la sobriété. Après ses années de désolation à Londres, c’est finalement en s’isolant et en se retrouvant face à elle-même, aux forces et à la beauté de la nature qu’elle parviendra à (re)trouver la joie de vivre sans une goutte d’alcool.

De retour aux Orcades, l’autrice se retrouve à travailler pour la Ligue de Protection des Oiseaux puis à séjourner quelques mois sur l’îlot de Papay. Après des années à la dérive, Liptrot revient sur ses nouveaux points d’ancrages, au cœur de cet archipel écossais caractérisé par des paysages vallonnés, des vents extrêmement puissants, des journées hivernales très courtes et une faune remarquable. À ses côtés, nous découvrons la richesse naturelle, historique et mythique de ces îles sauvages et isolées où les humain·es n’ont d’autre choix que de vivre au rythme de la nature. J’ai vraiment adoré découvrir ce petit coin du monde à travers le regard aiguisé et la très jolie plume de Liptrot qui, en nous parlant d’aurores boréales, de râles des genêts, de déconnection, de bains de mer, de tectonique, de plongées sous-marine ou encore d’énergies renouvelables, nous raconte avec pudeur et délicatesse, l’intensité de son cheminement vers la sobriété.


Les huit montagnes de Paolo Cognetti (Titre original : Le otto montagne)

Résumé : « « Quel que soit notre destin, il habite les montagnes au-dessus de nos têtes ». Pietro est un garçon de la ville, Bruno un enfant des montagnes. Ils ont 11 ans et tout les sépare. Dès leur rencontre à Grana, au cœur du val d’Aoste, Bruno initie Pietro aux secrets de la montagne. Ensemble, ils parcourent alpages, forêts et glaciers, puisant dans cette nature sauvage les prémices de leur amitié. Vingt ans plus tard, c’est dans ces mêmes montagnes et auprès de ce même ami que Pietro tentera de se réconcilier avec son passé – et son avenir. Dans une langue pure et poétique, Paolo Cognetti mêle l’intime à l’universel et signe un grand roman d’apprentissage et de filiation. »

Mon avis : ce roman m’a été offert par une amie et il m’a accompagnée lors d’un voyage à Rome au début de l’automne dernier. Ces vacances en Italie étaient en effet le moment idéal pour découvrir la plume de Cognetti et suivre ses personnages à travers les alpes italiennes.

Moi qui fuis les histoires d’amour, je ne savais pas trop si une histoire d’amitié m’intéresserait davantage… Et puis finalement, j’ai pris beaucoup de plaisir à découvrir la naissance et l’évolution d’une amitié entre deux jeunes garçons de milieux complètement différents. Alors que Bruno emmène Pietro explorer tous les recoins de ses montagnes natales, Pietro et ses parents offrent à Bruno la possibilité de s’instruire et d’aller à l’école à Milan. Malgré la force du lien qui se tisse entre eux au fil des étés, le décalage qui subsiste entre leurs familles, leur mode de vie et leurs aspirations menace sans cesse leur amitié.

Cette lecture fut une vraie bouffée d’air frais pour moi ! Au-delà des liens complexes qui rapprochent ou éloignent les différents personnages, j’ai aimé découvrir les alentours de la commune de Grana à travers leurs jeux d’enfants et leurs activités d’adultes. Les descriptions détaillées et imagées de l’auteur m’ont permis d’entendre le torrent couler, d’humer les pâturages en fleurs, d’observer les faucons voltiger dans le ciel et les marmottes sur le seuil de leur terrier, de sentir le froid me glacer le bout des doigts et le feu de bois les réchauffer. Moi qui adore les montagnes, j’ai pleinement apprécié ce moment d’évasion qui a par ailleurs nourri mes réflexions autour de l’autonomie, des relations parents-enfants et, bien évidemment, de l’amitié.


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