Ces dernières semaines j’ai beaucoup lu et réfléchi à propos de ce qui pouvait constituer la garde-robe écologique, éthique et minimaliste idéale. Plus je lisais, plus je réfléchissais, plus ma liste des critères à privilégier pour chacun de mes futurs achats vestimentaires s’agrandissait… et plus je désespérais en réalisant qu’à vouloir prendre tous ces critères-là en compte, jamais je ne pourrai acheter de vêtements qui me permettraient de porter mes valeurs…
Wear No Evil, le livre de Greta Eagan
J’ai alors repensé à l’une de mes premières lectures au sujet de la mode responsable: Wear no evil de Greta Eagan, un livre qui m’a été recommandé par Émilie de Dressing Responsable. Il s’agit d’un guide pratique riche en information sur les déboires éthiques et environnementaux de l’industrie textile et plein d’astuces et de bonnes adresses pour s’habiller responsable. Il s’adresse néanmoins à une audience américaine ayant un minimum de moyens et se souciant guère du nombre de pièces dans sa garde-robe… Ce n’est donc pas le guide parfait pour une garde-robe éco-éthique ET minimaliste si on vit en Europe avec un budget vestimentaire limité.
Cette lecture m’a malgré tout intéressé car la vision d’une garde-robe éthique et écologique de Greta Eagan rejoint la mienne en de nombreux points. En outre, l’auteure a créé une méthode originale et innovante pour guider ses lectrices dans leurs achats vestimentaires responsables.
La méthode Wear No Evil
Greta Eagan part du principe qu’il y a 16 caractéristiques éthiques et/ou écologiques à considérer lors de l’achat d’un article textile et elle les répertorie dans ce qu’elle appelle l’index d’intégrité:
Dans cette liste, Greta Eagan propose de choisir les 4 critères qui sont les plus importants à nos yeux, en plus du style. Pour elle, ce dernier est un critère fondamental et doit donc être à la base de tous nos choix vestimentaires. Ainsi, on se retrouve avec 5 critères en guise de référence de base pour chaque nouvel achat vestimentaire.
Ensuite, plus on remplit de critères lors de l’achat d’un article, plus on atteint un niveau élevé sur l’échelle de la mode responsable selon Greta Eagan: eco-citoyen(ne), eco-guerrier(re) ou, la consécration ultime, eco-gourou. Elle illustre sa méthode via un schéma inspiré des règles du baseball:
Comme on peut le voir, le style est à la base du schéma et c’est donc le 1er critère à satisfaire. Ensuite, en fonction du nombre de critères que l’on remplit, on atteint un niveau différent. Etant donné qu’il n’y a que 3 niveaux mais que l’on a sélectionné 4 critères, il y en aura toujours au moins un en trop qui restera sur le banc destiné aux “extras”.
Mise en pratique de la méthode Wear No Evil
Pour mettre cette méthode en pratique, imaginons que j’ai choisi les 4 critères suivants:
- local
- traçabilité
- fibres naturelles
- teintures naturelles ou à impact limité
Voyons maintenant comment appliquer cette méthode avec 2 exemples d’achats possibles.
Exemple 1: le pull Colette de la marque JUSTE, la révolution textile.
Avec les critères choisis, j’arrive à remplir les 3 niveaux, mais j’aurais même pu en remplir un autre, s’il y en avait un, puisque les teintures utilisées pour ce pull sont certifiées REACH. Tant pis, je reste une eco-gourou alors que j’aurais pu être une super éco-gourou!
Exemple 2: un débardeur de la marque Amaboomi.
Avec mes critères, je peux remplir seulement 2 niveaux: je suis donc une éco-guerrière. Pourtant, la marque Amaboomi a plein d’autres caractéristiques éthiques et écologiques: fibres recyclées, vegan, consommation d’eau limitée… pour n’en citer que quelques unes!
La méthode Wear No Evil : mon avis
Plusieurs choses me plaisent dans la méthode imaginée par Greta Eagan:
- Faire une liste des différentes caractéristiques qui contribuent à rendre une pièce éthique et écologique permet de voir clairement tous les paramètres à prendre en compte pour une garde-robe responsable.
- Créer un schéma ou un système pour guider ses achats nous oblige à réfléchir davantage à nos choix
- Le schéma qu’elle propose est facile à suivre
- Il peut également être assez simple , en fonction des critères choisis et du contexte, de remplir les 4 critères et d’avoir un sentiment d’accomplissement/de progrès.
Cela dit, la méthode Wear No Evil ne me convient pas pour plusieurs raisons:
- Bien que je conçoive que ce soit un critère important, le « style » ne devrait selon moi pas prévaloir sur la nécessité de choisir un article qui me va, qui me plaît ET dont j’ai besoin.
- Cette méthode ne prend pas en compte qu’une garde-robe écologique se doit également d’être minimaliste si l’on veut vraiment limiter son impact social et environnemental.
- D’autres caractéristiques me semblent importantes à considérer pour une garde-robe encore plus responsable
- Toutes ces caractéristiques sont selon moi aussi importantes les unes que les autres: c’est donc dommage de se limiter à 4 d’entre elles pour mesurer le degré éthique et écologique d’un article textile.
- En fonction des critères qu’on choisit, la tâche peut presque être trop « facile » et ne pas avoir un impact aussi positif qu’elle le pourrait. Si l’on choisit par exemple les critères « vegan », « contribution à une cause sociale » et « modulable », on peut très bien se retrouver avec un foulard qui se porte de 3 manières différentes, en fibres synthétiques et acheté dans une grande enseigne qui verse une infime partie de ses revenus à une bonne cause mais fait en même temps fabriquer ses vêtements dans des sweat shops… Bien sûr, mon exemple est extrême, mais je cherche juste à montrer qu’en limitant les critères, on se facilite la vie, mais on ne fait pas forcément une réelle différence.
- Le label rattaché à chaque niveau me dérange: s’il m’importe de pouvoir “mesurer” mes progrès personnels, l’attribution « d’étiquettes hiérarchiques » n’a rien de motivant pour moi.
Une référence inspirante
Malgré tout, Wear No Evil est une référence de qualité pour quiconque s’intéresse aux enjeux socio-économiques et écologiques de l’industrie textile et aux différents aspects à prendre en compte pour avoir une garde-robe responsable et durable. Alors si vous comprenez l’anglais et que vous avez l’occasion de mettre la main dessus, je vous invite à le lire! Vous y découvrirez en plus un tas de marques responsables. Même si certaines sont très onéreuses et la plupart sont basées aux USA, je trouve cela intéressant de découvrir les moyens que se donnent différentes personnes pour entreprendre de manière éthique et/ou écologique. Il existe également d’autres ouvrages au sujet de la mode durable et responsable, mais à ma connaissance, aucun n’est en français.
Wear No Evil m’a surtout permis de mettre au point ma propre liste de critères et ma propre méthode, pour qu’avoir une garde-robe plus responsable ne soit pas un défi insurmontable… je vous en reparlerai dans un prochain article 😉 .